Une communauté de formation à la science des données émerge à la faveur de la crise

Depuis la mise en place des plans de continuité d’activité et du télétravail dans les administrations, un groupe d’agents de l’État s’organise pour créer une communauté interministérielle de formation à la science des données. L’objectif : utiliser à bon escient le temps libre dont ils bénéficient depuis le confinement généralisé pour s’initier ou monter en compétences dans ce domaine.

“Tout seul on va plus vite, ensemble on va plus loin.” C’est la maxime qui anime la communauté que tente de mettre sur pied une poignée d’agents de différents ministères depuis le début du confinement. “Nous sommes agents publics, titulaires et non titulaires, travaillant dans le domaine de la statistique ou de la datascience, en central ou en déconcentré”, déclare en guise d’introduction le site de la communauté “Spyrales”.

“Durant la période de confinement en raison du Covid-19, nous ne pouvons pas accéder à toutes les données sur lesquelles nous travaillons au quotidien et certains de nos travaux se voient repoussés. Et nous souhaitons mettre à profit le temps disponible pour nous auto-former et/ou aider nos collègues à se former aux langages Python et/ou R, initier des projets en commun entre agents publics en rapport avec ces deux langages”, poursuit l’argumentaire.

L’initiative est encore embryonnaire, mais elle réunit déjà plus de 70 agents. Elle est née la semaine dernière de l’initiative personnelle de l’administrateur ministériel des données de Bercy, Stéphane Trainel, et de Romain Lesur, adjoint au sous-directeur de la statistique et des études au ministère de la Justice. La communauté s’est rapidement étendue à plusieurs ministères et a depuis obtenu le soutien de la hiérarchie, et notamment du secrétariat général des ministères économiques et financiers.

“Ne laisser personne sur le bord de la route”

Des agents de l’Intérieur, de différentes directions de Bercy (direction générale des entreprises, inspection générale des Finances…), des ministères de la Justice et de la Transition écologique et solidaire, mais aussi du CNRS, de l’Insee et de Pôle emploi, ont déjà rejoint Spyrales. La communauté se réunit sur la messagerie instantanée et sécurisée de l’État, Tchap, qui leur sert de quartier général pour partager des supports de formation et des conseils.

L’objectif de la communauté est avant tout de donner des clés aux agents qui souhaiteraient monter en compétences en matière de statistique et programmation informatique. Tous les profils sont les bienvenus : agents des catégories A, B ou C, que ce soient des “statisticiens qui cherchent à s’améliorer” ou des “informaticiens souhaitant découvrir nos outils et langages”, ou encore des agents d’administration centrale plus “classiques” qui sont ceux qui constituent au quotidien les bases de données et peuvent ainsi découvrir comment elles sont exploitées par la suite, expose Romain Lesur.

C’est en effet l’occasion, pour de nombreux agents, “d’enfin trouver le temps de se plonger dans cet univers et de prendre le virage de la data”, s’enthousiasme de son côté Stéphane Trainel. Si tous ne deviendront à l’évidence pas des datascientists de haut vol en l’espace de quelques jours ou semaines, le projet aura eu le mérite de les acculturer au potentiel de la donnée. 

C’est aussi une manière de mobiliser des agents publics qui se retrouvent sans activité en l’absence d’accès à distance à leurs outils de travail habituels. “Avec la mise en œuvre des plans de continuté d’activité, certaines activités critiques mobilisent de façon extrême certains agents, mais par ailleurs, il y a un grand nombre d’activités qui, elles, sont jugées moins vitales”, explique Romain Lesur. Aussi, de nombreux agents “n’ont plus accès aux bases de données, car cela requiert un certain niveau de sécurité et bien souvent des accès physiques”. C’est principalement à ces agents que la communauté s’adresse, pour les aider à rester actifs en profitant de la situation pour s’autoformer à la science des données, et par la même occasion, au travail collaboratif à distance. 

Pas de manipulation de données sensibles

“Nous utilisons le matériel mis à disposition de notre administration, notre matériel personnel, voire les solutions proposées à titre gracieux par des partenaires privés”, indique la communauté sur son site. Mais pas de panique, toutes les données confidentielles le resteront, puisqu’aucune ne sera exfiltrée des administrations. “On se contente d’exploiter les ressources qui existent en ligne et les données en open data”, précise Stéphane Trainel.

L’équipe prévoit d’ailleurs déjà de s’appuyer sur les données publiées en accès libre par Santé publique France sur le Covid-19 pour réaliser de premiers travaux. Elle entend également organiser des webinaires pour rassembler les membres de manière plus interactive autour de thématiques précises, qui restent encore à définir, la communauté Spyrales n’en étant qu’à ses balbultiements. 

Emile Marzolf

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