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Les contractuels auront une voie d’entrée dans les grands corps de l’État

Le gouvernement Castex doit transmettre au Conseil d’État, ce 30 avril, le projet d’ordonnance de réforme de la haute fonction publique. L’entrée dans les grands corps juridictionnels pourra s’effectuer au bout de deux ans, mais l’intégration ne pourra intervenir que plus tard et sans caractère automatique. Une voie d’entrée permettra aux contractuels justifiant de six ans d’expérience d’y entrer.

Une réforme au pas de charge. Le Président Macron, son Premier ministre, Jean Castex, et la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Amélie de Montchalin, ont arbitré, jeudi 29 avril, les derniers points du projet d’ordonnance de réforme de la haute fonction publique qui doit être transmis pour avis au Conseil d’État ce 30 avril, a indiqué une source dans l’entourage de la ministre.

Le passage en Conseil des ministres est prévu le 26 mai. D’ici là, le texte doit être examiné par plusieurs instances sociales de la fonction publique. Le contenu de l’ordonnance est partiellement connu, le détail des articles relatifs aux grands corps restant pour le moment encore assez secret. L’objectif politique reste le même. Si les grands corps ne seront pas tous supprimés comme le Président l’avait laissé entendre en avril 2019, ils seront réformés. L’inspection générale des Finances sera fonctionnalisée, c’est-à-dire que l’on n’y servira plus à vie mais pour une durée limitée.

Les corps du Conseil d’État et de la Cour des comptes – des corps juridictionnels protégés par des principes constitutionnels garantissant leur indépendance – ne pouvaient quant à eux pas être supprimés. Mais Emmanuel Macron entend bien essayer de diversifier les profils admis dans ces institutions qui, déjà aujourd’hui, ne recrutent pas seulement à la sortie de l’ENA, loin de là. Il s’agit de casser le monopole des 15 premiers de l’ENA et de ne plus permettre des atterrissages d’agents dépourvus d’expérience préalable dans l’administration active. Le tout sans revenir aux concours de la IIIe République avec leur cooptation…

Nouveau mode de recrutement pour les jeunes

Au final, le dispositif de l’exécutif présente deux réelles nouveautés : un nouveau mode de recrutement pour les jeunes et une autre voie d’accès pour les contractuels et les fonctionnaires justifiant de six ans d’expérience. Un troisième vivier ciblera les agents pourvus de quinze ans d’expérience, mais celui-ci existe déjà pour partie. Seront alors visés des juristes (par exemple des avocats ou des chefs de bureau juridique des administrations centrales, sous contrat) mais également des professionnels de l’évaluation ou des finances.

Pour les profils les plus jeunes, il s’agit désormais d’ouvrir les emplois d’auditeur (premier grade à la Cour des comptes et au Conseil d’État, accessible aujourd’hui quasi exclusivement depuis l’ENA) à une cible plus large que les agents issus du futur Institut du service public (ISP).

Pourront postuler les agents d’autres corps de catégorie A+, type directeur d’hôpital ou administrateur territorial. Dans tous les cas, il faudra justifier de deux ans d’expérience sur des missions A+. On pourra intégrer définitivement le Conseil d’État ou la Cour des comptes au bout de trois ans sur ces emplois-là, tout en sachant qu’il y aura plus de postes à pourvoir lors de l’entrée sur l’emploi que de postes à pourvoir lors de l’intégration définitive. Ce mécanisme est inspiré de ce qui se fait aujourd’hui au deuxième grade, celui de maître des requêtes au Conseil d’État ou de conseiller référendaire à la Cour des comptes. De fait, ce système vise à éviter le monopole du futur ISP sur les recrutements des jeunes.

Pour ce primorecrutement sur emploi, il faudra être auditionné par un comité paritaire. Y siégeront 2 personnes du corps et 2 personnes extérieures nommées par l’exécutif.

Éviter un retour à la cooptation

L’intégration, qui n’aura pas un caractère automatique, sera décidée, elle, par une commission paritaire, dans laquelle siégeront 3 membres du corps et 3 personnalités extérieures. Parmi ces dernières, une sera nommée par le chef de l’État et sera vraisemblablement une personnalité spécialiste des ressources humaines officiant au sein de la délégation à l’encadrement supérieur de l’État (Diese) – autre nouveauté de la réforme -, une personnalité sera nommée par le président de l’Assemblée nationale et une troisième personne sera choisie par le président du Sénat. Pour éviter le retour à la cooptation, l’intégration ne pourra être validée que si l’impétrant remporte 4 voix et non 3. En clair, pas d’intégration en cas de désaccord entre les 2 collèges. Cela promet de belles campagnes !

La deuxième voie d’accès concerne les contractuels et les fonctionnaires justifiant de six ans d’expérience minimum. Dans ce cas, le recrutement sera opéré au moyen d’une procédure de sélection commune au Conseil et à la Cour mais aussi à d’autres services comme les inspections interministérielles, désormais fonctionnalisées. L’agent recruté par cette voie pourra demander son intégration. Il sera alors auditionné par la commission paritaire de 6 membres décrite plus haut. Et il pourra obtenir son intégration plus rapidement que les jeunes, au bout de dix-huit mois contre trois ans pour les autres. Aucune indication n’est donnée sur l’ampleur du renouvellement permis par cette voie et qui dépendra du nombre de postes ouverts. Nombre lui-même conditionné par la pyramide des âges des corps.

Pas d’exemption pour l’entrée dans les grands corps

Par ailleurs, l’ordonnance va fixer le sort des magistrats de chambres régionales des comptes (CRC) et des tribunaux administratifs, aujourd’hui recrutés pour une partie à la sortie de l’ENA. Ils continueront à être recrutés à la sortie du futur ISP et pourront choisir leur affectation en fonction de leur classement. Mais ils auront l’obligation de servir deux ans dans le corps des administrateurs de l’État pour acquérir une expérience dans l’administration active. À noter qu’une exemption sera accordée aux élèves de l’ISP recrutés par le biais du concours interne ou du troisième concours, ce afin de leur éviter un parcours du combattant.

Mais cette logique a sa limite : l’entrée dans les grands corps sera la même pour tous les agents. Aucune exemption ne sera accordée pour les agents issus de l’interne ou du troisième concours. Tout le monde devra faire ses preuves pendant deux ans sur des emplois A+ et sur des fonctions d’administration active.

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