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La feuille de route de la directrice de l'INSP pour les prochains mois

Le Premier ministre Jean Castex a remis sa feuille de route à Maryvonne Le Brignonen, la directrice de l'INSP (Institut national du service public), l'établissement qui vient de remplacer l'ENA. Voici ce qu'elle contient. 

Esquisser les chantiers de la première directrice du nouvel Institut national du service public, Maryvonne Le Brignonen, alors même que le mandat de l'exécutif prend fin en mai 2022. Voilà l'exercice délicat auquel se frotte l'équipe Macron. Le gouvernement Castex vient de remettre sa feuille de route à la directrice de l'INSP ce vendredi 28 janvier à l'occasion de l'inauguration à Strasbourg de ce nouvel établissement venu remplacer l'École nationale d'administration (ENA) le 1er janvier 2022, avec des missions élargies.

Les travaux qui sont confiés à cette directrice (avec un échéancier) sont, pour certains, dans la droite ligne des recommandations de la mission de préfiguration de l'institut, conduite par le directeur de Pôle emploi Jean Bassères, et qui incitait le gouvernement à aller plus loin, notamment en matière de diversification dans l'accès à la haute fonction publique Voici quelques-uns des principaux chantiers confiés à la directrice de l'INSP, qui devront évidemment être confirmés après la présidentielle et les législatives [cliquez ici pour connaître le détail de sa feuille de route].   

Refonte des voies d'accès à l'INSP. Cette mission est inscrite dans le premier axe de la feuille de route visant à "recruter au sein de l'INSP des profils socialement, géographiquement et académiquement plus divers". L'exécutif demande ainsi à Maryvonne Le Brignonen de réfléchir à une “redéfinition de l'architecture globale des concours” d'accès à l'INSP et des “conditions propres à chacun d'entre eux afin d'assurer un recrutement répondant aux objectifs d'excellence et de promotion de la diversité”. Cette “refonte” attendue sera toutefois précédée d'une évaluation des voies actuelles d'accès à l'ex-ENA. Un bilan des voies traditionnelles d'accès (concours externe, interne et troisième concours) est ainsi attendu pour la fin février. Quant aux 2 autres dispositifs d'accès (concours docteurs et concours Talents), l'évaluation est attendue au terme de leur expérimentation, soit en 2024. Le gouvernement ne s'engage pas pour autant sur une date d'entrée en vigueur de refonte de ces concours. Dans son rapport remis en novembre, pour rappel, la mission Bassères regrettait l'impact limité du nouveau concours spécial Talents réservé aux candidats d'origine modeste (6 places uniquement pour l'accès à l'INSP). La mission proposait ainsi d'aller plus loin en créant un quatrième concours ad hoc pour les bousiers de l'enseignement en visant l'objectif de 15 places. Elle proposait aussi d'augmenter le nombre de places au concours spécial docteurs (4 places actuellement). L'exécutif n'était pas en désaccord sur l'objectif d'une plus grande diversification mais souhaitait avoir un peu de recul pour faire avancer les choses. Ce qui semble toujours le cas.  

Maintien de l'épreuve de culture générale mais suppression de l'épreuve d'anglais. L'ex-directeur de l'ENA Patrick Gérard avait déjà engagé un processus de révision des épreuves écrites et orales des concours d'entrée à l'école mais celui-ci n'avait pu aboutir à son terme. L'exécutif demande aujourd'hui à la directrice de l'INSP de relancer le chantier et d'étudier plusieurs pistes en ce sens d'ici mars prochain pour “revoir en profondeur” ces épreuves. À savoir une structuration des épeures écrites autour de mineures et de majeures, la mise en place d'épreuves à options, ou encore “l'introduction d'un thème annuel ou d'un référentiel d'œuvres pour l'épreuve de culture générale”. Une épreuve de culture générale qui sera donc “maintenue” alors que la mission Bassères proposait tout bonnement de la supprimer. Le gouvernement n'y était pas favorable, estimant en effet que le caractère discriminant de cette épreuve de culture générale n'était pas étayé scientifiquement. L'exécutif se disait toutefois prêt à revoir une révision la préparation à l'épreuve, ce qui est donc désormais envisagé. Quant aux oraux, le gouvernement demande à Maryvonne Le Brignonen de réfléchir à un “recentrage sur l'examen des capacités et du potentiel des candidats au-delà du contrôle des connaissances”. Dans le viseur de l'exécutif également, l'épreuve d'anglais : “L'opportunité de remplacer l'épreuve orale d'anglais par une certification reconnue au niveau international sera étudiée”. Une piste également avancée par la mission Bassères, qui proposait de remplacer cette épreuve orale d'anglais par l'exigence d'une certification préalable pour lutter contre les biais sociaux. L'exécutif vise une révision des épreuves orales et écrites en 2023 ou 2024. Un dossier sur lequel le prochain executif apposera sa patte.

Des alternatives au classement de sortie. Le gouvernement demande à Maryvonne Le Brignonen de “proposer des alternatives” au tant décrié classement de sortie de l'ENA, maintenu pour l'heure malgré la fin de la sortie directe dans les grands corps de l'État. Ses propositions sont attendues d'ici la fin du mois de février pour la mise en œuvre d'une “nouvelle procédure” en 2023 ou 2024. Une nouvelle procédure qui “sera proposée afin d'offrir une bonne adéquation entre les compétences recherchées par les employeurs et les profils des candidats, et de s'assurer de l'acquisition des compétences nécessaires à l'exercice de hautes responsabilités, en se prémunissant de tout risque de cooptation ou de discrimination”, explique Matignon. Dans son rapport, la mission Bassères proposait déjà de remplacer ce classement de sortie par une procédure d’entretien sur poste en laissant le dernier mot à l’employeur et en mettant en place un conseil de professionnalisation pour accompagner les choix d’orientation des élèves tout au long de leur scolarité. Une autre idée était également avancée, celle de la préspécialisation avant même la fin de la scolarité, avec un mécanisme de sélection permettant de s’inscrire dans chacune de ces filières.

Faire monter en puissance le tronc commun. Mis en place cette année et piloté par l'INSP, ce tronc commun de formation des aspirants hauts fonctionnaires est aujourd'hui prévu pour les élèves de 15 écoles de service public. Il est articulé autour de 5 thématiques (valeurs de la République et principes du service public; transition écologique; transition numérique; inégalité et pauvreté; rapport à la science).  Le gouvernement demande déjà aujourd'hui à la directrice de l'INSP de faire monter en puissance le dispositif. L'exécutif attend ainsi d'elle des préconisations sur le périmètre et le contenu de ce tronc commun. Et ce, via l'inclusion de nouvelles écoles ou de nouveaux corps dans le dispositif ou via l'introduction de nouvelles thématiques de formation commune comme les enjeux de souveraineté ou la conduite de projets. Des propositions attendues pour ce 1er semestre 2022 avant une possible et encore hypothétique évolution de ce tronc commun dès 2023. 

Les autres missions confiées à la directrice de l'INSP 
-    Rénover la scolarité “pour une plus grande professionnalisation, individualisation des parcours et spécialisation” ; 
-    Proposer un “plan d'action” pour faire de l'INSP “la tête de réseau de la formation continue des cadres supérieurs et dirigeants de l'État” en lien avec la Diese, la délégation interministérielle à l'encadrement supérieur de l'État ; 
-    “Faire monter en puissance” le CHESP (Cycle des hautes études du service public), ce dispositif de formation sur le modèle de l'École de guerre dédié aux personnes destinées à devenir des cadres dirigeants ;
-    “Refondre” l'offre de formation continue destinée aux cadres supérieurs et dirigeants de l'État ;
-    “Centraliser” sur une plateforme unique en ligne “l'ensemble” des offres de formation pour les cadres dirigeants ;
-    Nouer des partenariats avec des universités, "intégrer" des réseaux académiques internationaux et examiner "l'opportunité de l'intégration de l'INSP dans un réseau universitaire" ;
-    “Constituer” un corps enseignant composé de binômes enseignants-chercheurs/praticiens de l'action publique (une vingtaine cette année) et “lancer” des projets de recherche dans le domaine de l'action publique. L'INSP accueillera ainsi un “corps professoral permanent d'enseignans-chercheurs” à temps plein et détachés à l'INSP. À ce propos, dans le cadre de la loi de finances, le gouvernement avait ouvert 1,75 million d'euros de budget supplémentaire pour l'INSP afin de financer 20 emplois de plus au sein de l'établissement (10 pour créer ce corps professoral permanent, et 10 pour accompagner le développement de l'offre de formation continue) ;
-    Intégrer des modules sur l'apport des sciences dans l'offre de formation initiale et continue et “offrir” un parcours doctoral aux élèves volontaires ; 
-    “Développer et faire évoluer” les cycles internationaux et l'offre de formation à l'international ; 
-    Engager des travaux préparatoires à l'organisation par l'INSP du recrutement des diplomates du cadre d'Orient. 

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